“Daesh matchmaker” dreams of a second chance – L’essentiel, Luxembourg
Original article published in L’essentiel, Luxembourg.
Pendant des années, une ex-étudiante britannique a œuvré pour attirer de jeunes musulmanes en Syrie, où elles épousaient des jihadistes. Aujourd’hui, Tooba Gondal veut rentrer chez elle.
Comme de nombreuses femmes de jihadistes, Tooba Gondal prend son mal en patience dans le camp d’Aïn Issa (Raqqa), attendant de connaître son sort. Il y a deux mois, la Britannique de 25 ans avait tenté de rejoindre la frontière turque en compagnie de ses deux enfants. Arrêtée, elle a été emmenée dans ce camp de réfugiés. Aujourd’hui, celle que le «Daily Mail» surnomme la «marieuse de Daech» ne souhaite qu’une chose: rentrer au pays. «Les Britanniques ont peur, ils ne veulent rien avoir à faire avec nous. Mais ils le doivent. Nous ne pouvons pas rester pour toujours dans ces camps», explique la jeune femme au Rojava Information Center.
Tooba Gondal estime que les épouses et les enfants de l’EI sont «devenus des victimes» et que leur retour chez eux est légitime. «Je n’ai fait de mal à personne en Syrie pendant quatre ans. Quelle menace puis-je représenter pour la Grande-Bretagne?», plaide-t-elle. La jeune femme assure avoir subi «un lavage de cerveau», elle qui a pendant des années alimenté la propagande de l’EI. «Je regrette tout ce que j’ai fait, et je veux rentrer au Royaume-Uni pour avoir une seconde chance de recommencer ma vie à zéro», assure la mère de famille.
Née à Paris, Tooba Gondal était encore une toute jeune femme lorsqu’elle a quitté la Grande-Bretagne pour rejoindre les rangs de l’EI, en 2014. Étudiante à l’Université de Londres, fille d’un homme d’affaires réputé, la Britannique a plaqué une vie aisée pour devenir Umm Muthanna Al Britaniyah. Depuis Raqqa, la jeune femme a rapidement endossé le rôle de «marieuse»: sa mission était de glorifier Daech sur les réseaux sociaux afin d’attirer de jeunes musulmanes britanniques en Syrie, où elles épousaient des jihadistes. Mariée à Al Lubnani, un terroriste libanais, Tooba Gondal exerçait une influence dévastatrice sur les demoiselles qu’elle convoitait sur Internet.
En 2015, la Londonienne avait applaudi les attentats du 13 novembre, écrivant «Brûle Paris, brûle» sur Twitter. Quelques mois plus tôt, la jihadiste avait annoncé, toujours sur le réseau social, la mort de son mari «en martyr». La Britannique s’est remariée avec un terroriste pakistanais, mais son activité de propagande a commencé à s’essouffler en 2016. Après la mort de son deuxième époux, Tooba Gondal n’a cessé de changer de village pour fuir les combats. «Nous ne savions pas qui était sur la gauche en train de nous attaquer, qui était sur la droite… Avec qui nous étions… C’était le chaos complet», raconte la jihadiste repentie, qui attend désormais de savoir si elle pourra retrouver sa famille.